Dans un contexte où la lutte contre la fraude et la contrebande s’intensifie, Hervé Natali, responsable des actions anti-traffics pour Seita Imperial Tobacco, tire la sonnette d'alarme. Selon lui, la contrebande de tabac connaît une évolution inquiétante en France, avec une montée en puissance des trafiquants de drogue qui diversifient désormais leurs activités.
La situation est particulièrement préoccupante depuis l’augmentation des prix du tabac en 2018, qui a coïncidé avec un essor des ventes de cigarettes sur le marché noir. Des expertises récentes, rapportées par Sud Ouest, estiment que les pertes fiscales dues à la contrebande se chiffrent chaque année entre 3,5 et 5 milliards d'euros, mettant ainsi l’État sous pression pour agir. Mais ce qui inquiète le plus, c’est le mélange entre trafiquants de drogue et de tabac, facilitant l’essor d’un marché clandestin.
Dans certaines régions, notamment les Pyrénées-Atlantiques, le problème reste persistent. Des bandes organisées, souvent en provenance des pays de l’Est, se partagent le territoire, témoignant d’une concurrence accrue et de rivalités violentes. Le phénomène dépasse désormais les frontières : malgré une forte régulation, des réseaux se présentent sur les plateformes de commerce en ligne et même dans le dark web, comme l’a rappelé une récente enquête du Monde.
« Les chiffres issus de notre étude 'Ramasse paquets' sont parlants : plus de 40 origines de cigarettes différentes ont été identifiées », explique Natali, citant d’importantes variations selon les régions. La tendance suggère que la consommation clandestine s’épanouit au-delà des zones traditionnellement touchées par la contrebande.
« J’appelle à un alignement des peines pour le trafic de tabac sur celles liées aux stupéfiants », plaidait Natali lors d’une récente interview.
Face à cette menace grandissante, des voix s’élèvent pour demander une action renforcée de l'État. Par exemple, réaliser davantage de contrôles aux frontières et dans les villes, impliquer les 28 000 policiers municipaux, et renforcer les effectifs de la douane sont des propositions énoncées par des experts. Le sujet est brûlant, d'autant plus que les municipalités commencent à mettre en place des campagnes pour sensibiliser la population contre l'achat de cigarettes au noir.
La ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, a récemment proposé de limiter à une cartouche par personne la quantité de tabac pouvant être ramenée d'un autre pays de l'Union européenne. Cependant, cette initiative suscite des doutes quant à sa mise en œuvre effective, comme l’indiquent plusieurs analystes, notamment ceux de Libération.
Alors que l’imposition de mesures plus strictes semble inéluctable, l’analyse de l'évolution du marché du tabac pourrait révéler des enjeux sociétaux plus larges, où l'interaction entre législation, consommation et réseau criminel ne fait qu'accroître la complexité de la lutte contre le trafic.







