Le tribunal correctionnel de Paris annoncera son verdict le 13 avril 2026 concernant Lafarge et huit de ses anciens dirigeants, accusés d'avoir financé des groupes jihadistes en Syrie pour assurer le fonctionnement d'une cimenterie, même durant la guerre civile. Cette affaire, qui a débuté en novembre 2025, met en lumière les décisions controversées prises par le géant du ciment, désormais intégré au groupe suisse Holcim.
Les accusations principales portent sur des paiements de plusieurs millions d'euros réalisés entre 2013 et 2014 via sa filiale Lafarge Cement Syria, visant à maintenir l'activité de l'usine de Jalabiya, alors que la plupart des entreprises étrangères se retiraient de la Syrie. Parmi les prévenus, l'ancien PDG, Bruno Lafont, ainsi que cinq anciens responsables et deux intermédiaires syriens apparaissent au cœur de ce procès. Cependant, l'un des intermédiaires a manqué à l'appel.
Le ministère public a qualifié les faits de "d'une extrême gravité", à l'appui de ses réquisitions qui recommandent jusqu'à huit ans de prison pour certains accusés. Pour Bruno Lafont, le parquet a réclamé six ans d'emprisonnement, 225 000 euros d'amende et une interdiction d'exercer toute fonction commerciale pendant une décennie.
Les avocats de la défense, tout en plaidant la relaxe, ont tenté de souligner les difficultés rencontrées dans un contexte chaotique marqué par un grand nombre de factions armées. Me Jacqueline Laffont, l’avocate de Lafont, a insisté sur la nécessité de comprendre l'exceptionnalité de la situation, bien au-delà d’un simple schéma économique. "Bruno Lafont est accusé de pratiques cyniques, mais en réalité, il a agi selon son meilleur jugement à l’époque”, a-t-elle défendu.
Cette affaire ne reste pas sans provoquer des interrogations éthiques majeures sur les responsabilités des entreprises en temps de conflit. Comme le souligne le quotidien *Le Monde*, cette situation soulève des débats sur les choix commerciaux dans des environnements instables. En 2022, Lafarge a déjà été amené à régler 778 millions de dollars aux États-Unis dans le cadre d'un accord de plaider-coupable, marquant un tournant décisif dans l’histoire de l’entreprise.
Le jugement à venir reste particulièrement attendu, tant par les experts du droit national qu'international, qui considèrent cette affaire comme un précédent dans le domaine de la responsabilité des entreprises face aux crises humanitaires. Les implications peuvent redéfinir les attentes en matière de gouvernance d’entreprise, notamment dans des contextes de conflit où les enjeux éthiques sont exacerbés.







